YVON LE MEN

La Bretagne sans permis

© Murielle Szac

RENCONTRE

  • Dimanche 4 juillet
  • 14h30
  • TARIF POUR LA JOURNÉE : 6 €
  • Hameau de Saint-Antoine (Lanrivain)

Traverser la Bretagne en “voiturette” sans permis (VSP), tel est le pari un peu fou d’Yvon Le Men et de son comparse Alexis.  Comme on s’en doute, le but du voyage ne sera pas le plus important. L’essentiel est le chemin lui-même et les rencontres qu’il rend possible (Michel Le Bris, Xavier Grall…) Tout commence par l’enterrement d’un grand chanteur breton Yann-Fañch Kemener… De crêperie en taverne, les deux amis ont bien des aventures avec cette voiturette doublée par les tracteurs…   Au fil du chemin ils égrènent leurs poètes ou écrivains préférés et nous régalent d’anecdotes savoureuses… Mais ce périple ne sera pas sans péril, surtout dans les Monts d’Arrée lors de la montée à l’assaut de l’antenne de Trédudon ! La route sera longue de Silfiac à l’île de Batz (on dépasse rarement les 35 km/h) mais on ne s’ennuie pas en compagnie d’Yvon Le Men, dont le talent nous tient en haleine jusqu’au bout… On aimerait que ce tour de Bretagne sans permis se poursuive encore ! Mais la VSP a ses limites…

La Bretagne sans permis a été éditée en 2021 aux Editions Ouest-France.

 

“« La Bretagne sans permis » est un livre qui fait à la fois l’éloge de la Bretagne et de la VSP.

La Bretagne, vous voyez ce que c’est, c’est à partir de Rennes, ça va jusqu’à la rade, c’est plein d’ajoncs, d’hortensias bleus, de dolmens et de magasins Leclerc. C’est plein de rue de la soif, plein de bretons aussi qui regardent le ciel comme une promesse, l’océan comme un songe. C’est au bout de la France, ça fait comme un grand nez qui respire le large. La Bretagne est un pays de voyageurs. On s’y nourrit de galettes, de far, de chouchen, de kig-ha-farz et de légendes.
La VSP, vous voyez ce que c’est, c’est une voiturette qu’on trouve un peu partout, notamment en Bretagne, pour peu qu’on ne soit plus, pour une raison ou une autre, en capacité d’utiliser son permis de conduire, pour peu qu’après avoir fait la riboule on ait été obligé de souffler dans le biniou. La VSP est l’acronyme de « voiture sans permis ».
Yvon Le Men a écrit « La Bretagne sans permis » et c’est une ode à la lenteur. Une amie mienne, Juliette qui d’un prénom, le sien, a fait son nom d’artiste, un jour a noté justement cette phrase qui est toute une philosophie « La vie est trop courte pour aller vite. »
« La Bretagne sans permis » est un livre sorti aux Éditions Ouest-France et justement, en guise d’avant-propos, on trouve trois bouts d’articles parus dans Ouest-France qui se prononce en réalité Oueste-France avec un e à la fin d’Ouest parce que l’âpreté des côtes granitiques, la brutalité des vents marins, la rudesse des vies en mer n’interdisent pas une certaine féminité.
Le premier article évoque une VSP appréhendée par des motards sur l’A10 parce qu’elle roulait à 50 kilomètres heure. Quand tant de voitures sont verbalisées pour excès de vitesse, les voiturettes à qui l’on afflige une amende pour cause de trop grande lenteur représentent une sorte d’aristocratie de la délinquance autoroutière. Le deuxième article rend compte d’une voiture sans permis arrêtée entre la Ciotat et Marseille (dans le cadre d’un contrôle routier classique de téléphone au volant) du fait que la conductrice transportait un poney blanc. « Cette dame très gentille, a parfaitement aménagé sa voiture en mini-van a indiqué le policier, le poney rentre par l’arrière et ressort par la portière avant-droite ». Notons que ni le poney, ni la conductrice ne téléphonaient, ce qui est un signe de civisme puisque la crainte principale quand on téléphone au volant est de perdre trois points sur son permis de conduire alors que la dame et le poney étaient dans la même exacte situation. Ni l’un ni l’autre n’en possédaient. Poney blanc, blanc poney.
Le troisième article évoque un fait-divers qui eut lieu en octobre 2019. Son titre
« La voiture avait fait 20 kilomètres à contre-sens ». Sa conclusion : « Il ne se rappelle pas, non plus, pourquoi il n’a plus de permis. »
Mais je vous mettrais sur une mauvaise voie si je vous présentais ce livre comme un recueil de faits-divers amusants ou pittoresques. C’est une promenade dépaysante et douce, entre hier et aujourd’hui, entre humour et mélancolie, d’ailleurs le récit s’ouvre sur l’enterrement de Yann-Fanch Kemener, chanteur celtique. Yvon et Alexis dans leur VSP vont faire leur deuil en prenant la route, celle du souvenir, de l’amitié, de la poésie.
Permettez-moi un souvenir personnel. En 1978, je passais le permis de conduire pour la troisième fois. Au moment de me donner le papier qui attestait que j’avais finalement réussi mon examen, l’examinateur, accablé, me fit cette réflexion
« Tenez, vous ne conduirez pas, vous roulerez… »
Peut-être est-ce en réminiscence de ce léger moment d’humiliation que j’ai pris un plaisir complice et solidaire à rouler sur les routes de Bretagne en compagnie d’Yvon Le Men dans son si joli livre « La Bretagne sans permis ».

L’équipe – François Morel (Chroniqueur)

 

N’avoir nulle part où aller sauf à l’intérieur de soi… Être assigné à résidence avec des livres pour seuls compagnons… Regarder le monde à travers une vitre en se demandant si le temps ne s’est pas arrêté… Telle est la situation évoquée par Yvon Le Men dans La baie vitrée. Le poète est enfermé à son domicile, seul et relié aux autres, à l’écoute des mauvaises nouvelles du monde et des chants d’oiseau qui l’apaisent.

Il lit et écrit. Écoute et observe. Des poèmes naissent de ce quotidien empêché. Les mots de l’écrivain découpent alors des morceaux de ciel pour les oiseaux en cage. Des mots qui ouvrent portes et fenêtres, conjurent l’absence et invitent des hôtes essentiels à sa table de silence. Avec La baie vitrée, le poète a écrit le livre du réenchantement dont nous avons besoin. Jamais la poésie ne lui est apparue si nécessaire.

La baie vitrée a été éditée en 2021 aux éditions Bruno Doucey dans la collection Soleil noir.

"Quand l’humanité reviendra les hommes et les femmes corps et âmes touchés caressés embrassés mélangés partagés traversés comme on traverse un pont entre des bras"
Yvon Le Men (Extrait du recueil La baie Vitrée - 2021)

©Murielle Szac

Yvon Le Men est né à Tréguier en 1953, installé à Lannion, il est la figure de proue de la poésie aujourd’hui écrite en Bretagne. Depuis son premier livre, Vie (1974), écrire et dire sont les seuls métiers de ce poète. « L’écriture, c’est la solitude et l’absence. La scène, c’est la présence, le partage. J’ai besoin de ces deux chemins ». Il fait ainsi partager sa passion au plus grand nombre, dans les salles de spectacles ou au festival Étonnants Voyageurs où il programme des poètes du monde entier. Sous le plafond des phrases est publié aux Éditions Bruno Doucey en janvier 2013 dans la collection Embrasures. Son recueil En fin de droits est publié en octobre 2014 aux Éditions Bruno Doucey. En 2015, il publie Une île en terre, premier recueil d’une trilogie intitulée Les continents sont des radeaux perdus. Le deuxième recueil de cette trilogie, Le poids d’un nuage, paraît en janvier 2017, et le troisième, Un cri fendu en mille, en septembre 2018. En 2019, il reçoit le Goncourt de la poésie pour l’ensemble de son œuvre. Son recueil jeunesse Les mains de ma mère, illustré par Simone Massi, paraît aux Éditions Bruno Doucey dans la collection Poés’histoires en octobre 2019. En 2021, les Éditions Bruno Doucey publient La baie vitrée.